Saleinaz 2985
Lundi 18 aout. Pour moi la course débute au café de l’hôtel Terminus à Orsières. Rigolo de commencer une ascension au point où « tout le monde descend » ! D’ailleurs, savez-vous que Terminus était le dieu romain des frontières et des bornes ? Ceux qui connaissent bien notre chef de course Philippe et sa passion actuelle pour le sentier des bornes ne s’étonneront pas que notre course débute et se terminera au Terminus ! Les superstitieux de notre groupe de 13, sont aussi rassurés qu’un dieu romain, qui nous protégera au besoin, soit d’emblée convié.
L’ascension démarre avec soleil et ciel bleu. Une des finalités de notre course est de rendre visite à Stéphane et Valérie Robert qui gardiennent Saleinaz. Dès les premiers pas, je me réjouis à l’idée des gâteaux et autres gâteries qui certainement nous attendent en haut. Notre équipe monte gaiement dans l’ombre de la forêt. Au pied du secteur des dalles, les rapides attendent les flâneurs. Les marches taillées, celles d’acier et les chaînes rendent la progression efficace et sécure. Philippe assure les moins rompus à cet exercice « vertigineux ». Le long de la moraine, les gourmands grapillent des myrtilles. Devant nous, s’étend l’éboulis qui résulte de l’écroulement d’une partie de la face nord du Petit clocher des Planereuses survenu au printemps 2023. Le chemin qui le traverse (cf Ton bulletin 2023/5/septembre-octobre) escalade des blocs, en contourne d’autres et mérite son marquage bleu-blanc. Après ce gymkhana, la pause au lieu-dit « la gare » (pas encore terminus 😉) est appréciée. Une dernière montée et c’est l’arrivée à la cabane. L’accueil de Valérie et Stéphane est généreux et grandiose. Avec un couple d’amis monté la veille (et que nous avons croisés aux dalles), ils nous ont préparé des gâteaux aux fruits croustillants et rafraichissants…et même deux tresses pour le petit-déjeuner de demain. Un grand merci !
Le mythique « thé d’accueil », les premières bières, sirops et autres liquides avalés, un petit groupe se dirige léger vers le glacier de Saleinaz. Notre progression est rapidement interrompue. Le sentier traverse un dévaloir qui, sans équipement ad hoc, se révèle redoutable. Inutile de risquer une chute fatale pour rebrousser chemin peu après. Sagement, nous effectuons un demi-tour direction l’apéro !
Puis excellent repas avec un dessert bien de chez nous : soufflés glacés à l’absinthe. La soirée sera magnifique. Le coucher de soleil de toute beauté…et la nuit confortable. Notre groupe, seul hôte de la cabane s’est vu offrir deux dortoirs, un luxe prodigieux. Cette nuit, même l’expédition au wc extérieur s’avère jouissive. Le ciel est spectaculaire, la voie lactée passe au-dessus du toit telle une avenue blanche, on pourrait cueillir les étoiles si proches et une étoile filante me permettra même de chuchoter un vœu .
Mardi 19 aout tôt, 3 volontaires audacieux se lancent en direction du col des Planereuses. Le grondement des chutes de pierres qui dévalent des Petite et Grande Planeureuse n’est guère engageant ; les cairns, balises indispensables dans ce désert rocailleux, sont introuvables et nos 3 mousquetaires n’hésitent pas à modifier leur objectif. Ils enfourchent la crête devant eux et la gravisse jusqu’au point 2931. Là, la situation se corse. Sans matériel, inutile et dangereux de poursuivre. Ils profitent de la vue majestueuse, assistent au spectacle de haute voltige que leur offre un petit avion puis entament une descente rapide. Depuis la table du petit-déjeuner où l’équipe « grasse matinée » se délecte, nous les voyons courir en bas la crête.
Il est temps de prendre le chemin du retour. La météo annonce de la pluie pour le début de l’après-midi et nous aide à quitter cette si belle cabane et nos généreux gardiens. La descente se fait à un très bon rythme. Les dalles sont passées en toute sécurité alors que le soleil brille encore. Repus après notre luxueux petit-déjeuner, ce n’est qu’arrivés aux voitures que nous pique-niquons. Un dernier café au Terminus et chacun prend le chemin du retour bercé par les souvenirs de ces deux jours passés dans une ambiance respectueuse et chaleureuse.
Les lecteurs curieux diront cependant : « et le titre ? ce chiffre c’est quoi 2985 ? » Certains penseront que c’est l’altitude de la cabane et s’en satisferont. Les connaisseurs et clubistes neuchâtelois savent néanmoins que l’altitude de la cabane de Saleinaz est de 2690m et pas 2985m.
Les plus curieux auront peut-être tapé 2985 dans un moteur de recherche. Ils auront alors découvert que 2985 peut faire référence à une galaxie spirale dans la constellation de la Grande Ourse ou à un astéroide nommé Shakespeare ou encore au toboggan en Lego Duplo de Winnie l’Ourson 😉. Mais quel lien avec notre sortie ?
En fait, il faut lire 29/85 soit vingt-neuf et quatre-vingt-cinq : les âges du junior et de l’aînée de notre équipe ! Le club c’est ça aussi : l’amour de la montagne, la diversité des expériences, le partage et la transmission des connaissances, la tolérance, la solidarité, l’accueil,…Oubliées les frontières d’âge, de langues, d’origines,…
Cette course a été un des très beaux moments de ma vie de montagnarde. Pas d’exploit alpin mais un partage de tous les instants dans la gaieté et le respect amical. Merci aux gardiens Valérie et Stéphane pour leur accueil joyeux et généreux, merci à notre chef de course patient et expert, merci à notre aînée qui nous permet de rêver que nous partagerons encore de nombreuses aventures sportives, merci à notre junior qui a montré une avidité à améliorer ses connaissances et une bienveillance remarquable.
Merci à tous, toutes et à bientôt.
Danielle
